L’ambassadeur Guy Alexandre nous a quittés

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Le professeur Guy Alexandre, 68 ans, sociologue, ancien Ambassadeur d’Haïti en République Dominicaine est décédé d’une crise cardiaque ce vendredi 28 février vers 8:00 am en sa résidence à Port-au-Prince.Sa dernière apparition publique remonte à ce jeudi 27 février dans le cadre de la réception offerte par l’ambassade dominicaine à Port-au-Prince à l’occasion de la commémoration du 170e anniversaire de l’indépendance de la République Dominicaine.L’ambassadeur Guy Alexandre a récemment représenté l’État haïtien à la l’Organisation des États Américains dans le cadre des échanges relatifs au dossier de l’Arrêt 168-13.Le diplomate a toujours déploré les conséquences de l’absence d’une politique migratoire haïtienne axée sur les attentes et besoins des haïtiens de la Diaspora. Il a particulièrement gardé un gout amer du peu de cas fait par les autorités haïtiennes et dominicaines du sort de la diaspora haïtienne en République dominicaine. « Le discours des dirigeants haïtiens et dominicains des deux côtés de la frontière, constatait-il avec désillusion, est largement marqué par l’optimisme, en ce qui concerne l’état des rapports bilatéraux. A en croire Chefs d’État, Ministres des Affaires Étrangères et Ambassadeurs, les relations entre la République Dominicaine et Haïti seraient ‘’bonnes », voire ‘’excellentes‘’, en tout cas elles connaîtraient ‘’leur meilleur moment ». On connait aujourd’hui, avec l’Arrêt 168-13, les conséquences d’une telle désinvolture des autorités constituées. »Les dirigeants de nos deux pays ont, pour des raisons diverses, « la tentation de ‘’gommer ‘’ cette réalité du réveil d’un anti-haitianisme militant qui ne recule pas devant l’appel à la violence », a-t-il écrit dans un document intitulé « Diplomatie, migration et droits des personnes : matériaux pour un état des lieux des relations haïtiano-dominicaines (mai 2007). »En créole haïtien, nous dirions que nos dirigeants, les responsables politiques des deux républiques, sont tentés de ‘’kase fèy kouvri sa ‘’- répandre des feuilles pour cacher la saleté, littéralement ». »Ma thèse est que s’engager dans cette voie est le moyen le plus sûr pour enfermer les relations bilatérales dans une dynamique contraire à celle de la normalisation engagée dans les années 1990, et laisser ainsi se déployer en même temps que se sédimenter un ensemble d’éléments négatifs qui, à relativement court ou moyen terme, ne peuvent qu’exploser à la face de nos deux sociétés ».Mais ce qu’il redoutait par-dessus tout, c’est le danger représenté par le secteur dominicain d’extrême-droite que le sociologue dominicain Carlos Dore Cabral a qualifié d' »ultra-nationaliste ». »Ce courant, disait-il souvent, il faut le dénoncer, l’attaquer de front pour déjouer ses manœuvres qui n’ont qu’un objectif : construire un courant idéologique anti-haïtien afin de dresser les deux peuples l’un contre l’autre, jusqu’à la confrontation. »Ce qui serait très dangereux pour le peuple haïtien ».Guy Alexandre fut membre fondateur du Mouvement d’action démocratique (MAD), une organisation politique surgi au lendemain de la chute de la dictature des Duvalier en 1986.Sa nomination au poste d’ambassadeur d’Haïti en République Dominicaine (à deux reprises), lui donna l’occasion de parfaire sa connaissance du dossier haitiano-dominicain et de nouer des contacts-clés avec des intellectuels dominicains d’envergure.Il s’illustra également dans l’enseignement, d’abord Professeur au Collège privé expérimental Kayanou, puis à l’Université épiscopale d’Haïti.Il laisse d’intéressantes initiatives à compléter dans le cadre du plan d’action du Collectif haïtien sur les migrations et le développement (COHAMID), un think tank sur les politiques publiques relatives à la migration.Il laisse dans l’affliction son épouse et doyenne de l’Université Épiscopale d’Haïti, Évelyne (Lyne) Margron, ainsi qu’une fille et trois petits-enfants actuellement en France.Haïti perd en lui un digne fils et un militant convaincu des droits des migrants !HA/radio Métropole Haïti

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