
La visite du ‘Parc national historique Citadelle, Sans Souci Ramiers » est la seconde étape de la tournée de deux jours – du 16 au 18 septembre – qu’effectue en Haïti une importante délégation de l’UNESCO conduite par sa Directrice générale, Irina Bokova. Que savez-vous de ce parc, créé par décret présidentiel en 1978, inscrit sur la liste du Patrimoine Mondial en 1982 et géré par l’ISPAN ? Situé dans la partie septentrionale de la République, le Parc National Historique s’inscrit dans la zone centrale des massifs du Nord qui se prolongent en République Dominicaine. Le palais Sans-Souci, les édifices des Ramiers et, tout particulièrement, la citadelle sont les premiers monuments construits par des esclaves noirs qui venaient à peine de briser leurs chaînes ; ce sont donc des symboles universels de liberté. Le 1er janvier 1804, après quatorze ans de luttes des esclaves noirs de l’île contre les colonisateurs, Jean-Jacques Dessalines, le principal meneur de la révolution, proclama l’indépendance de la République d’Haïti. L’empereur Dessalines chargea immédiatement Henri Christophe, l’un de ses généraux, de construire une énorme forteresse sur le pic Laferrière, ou pic Henri, 28 km au sud-ouest du cap d’Haïti. À la mort de Dessalines, en 1807, la République haïtienne fut divisée en deux États : la partie sud, gouvernée par Pétion, et la partie nord, où Christophe s’autoproclama roi en 1811. La citadelle Henri, conçue à l’origine pour défendre la liberté, fut maintenue comme forteresse par le nouveau despote mais elle ne fut inaugurée qu’en 1813. Au cours de cette même époque, le roi Christophe (Henri Ier) entreprit la construction d’un palais magnifique entouré de jardins, au pied de la route d’accès à la citadelle, près du village de Milot. Le palais Sans-Souci, dont ne subsistent guère plus que des ruines, est aujourd’hui en cours de restauration. Il doit sa beauté étrange à la manière exceptionnelle dont il se fond dans son cadre de montagnes, ainsi qu’à ses emprunts à des styles architecturaux différents, et réputés inconciliables. L’escalier baroque et les terrasses de style classique, les jardins étagés rappelant Potsdam ou Vienne, les canaux et les bassins librement inspirés de Versailles confèrent une qualité onirique malaisément définissable à la création de ce roi mégalomane. Construction militaire et manifeste politique, la citadelle Henri, construite à une altitude de 970 m, couvre une superficie de l’ordre de un hectare. C’est l’un des meilleurs exemples conservés d’ingénierie militaire du début du XIXe siècle. Son plan a été dessiné par le Haïtien Henri Barré, mais il est probable que le général Christophe joua un rôle fondamental dans sa conception, et notamment dans celle de trois de ses éléments : les masses saillantes remarquablement articulées entre elles de manière à permettre un recours cohérent aux pièces d’artillerie ; le système complexe d’alimentation en eau et de citernes ; les murs défensifs colossaux qui rendaient cette citadelle imprenable. Elle pouvait abriter une garnison de 2 000 hommes, et jusqu’à 5 000 en cas de nécessité. Le territoire du Parc, précise l’UNESCO, est témoin d’un processus historique à portée universelle. Ses monuments ont été érigés pour protéger l’indépendance d’Haïti, premier État fondé à l’époque contemporaine par des esclaves victorieux. C’est précisément pour cette raison que le Parc a été classé Patrimoine de l’Humanité en 1982 par l’UNESCO. Les monuments du parc ont été inscrits par la suite sur la liste du Patrimoine National par arrêté en date du 23 Août 1995. Le Parc National Historique Citadelle Sans-Souci Ramiers a donc été inscrit au Patrimoine mondial en 1982 sur proposition du Conseil International des Monuments et des Sites (ICOMOS). Dans le rapport d’évaluation du Conseil International des Monuments et des Sites (ICOMOS, Mai 1982), la Citadelle Henry est perçue à la fois comme “un ouvrage militaire et un manifeste politique et constitue l’un des meilleurs témoins de l’art des ingénieurs militaires au début du XIXe siècle”. Il est doté d’objectifs bien définis : • culturels : préservation et mise en valeur des zones monumentales (Citadelle, Ramiers, Sans-Souci et vestiges coloniaux). • paysagers : protection et mise en valeur des milieux caractéristiques de cette région : mornes volcaniques, mornes calcaires, vallées. • humains : amélioration des conditions de vie dans la région. La complexité des problèmes, souligne l’ISPAN, le souci de mener une action efficace et d’éviter la dispersion ont conduit à limiter sa superficie à environ 25 km2. Cette délimitation a été établie à la suite d’une mission de l’UNESCO menée par Yves Renard en 1983. En l’absence de toute législation nationale, ce sont les propositions de Renard qui constituent jusqu’à aujourd’hui les références spatiales pour le Parc, à savoir une aire de 25 km2 comprenant le parc proprement dit et sa zone périphérique. Le Parc se trouve ainsi délimité au nord par le site de Sans-Souci, de la route d’accès à la Citadelle Henry jusqu’à la ravine Brisement ; à l’ouest par le versant Ouest de la chaîne du Bonnet-à-l’Evêque jusqu’au Grand Gouffre, (côte 500/600 m) ; à l’Est il coupe la vallée de Brostage près du bourg de Dondon entre les mornes Godignant et Bellevue ; au Sud il longe les crêtes des mornes Corneille, Ginette et Jérôme. L’aménagement et la gestion actuels du Parc intègrent aujourd’hui les grandes lignes d’une stratégie de développement axée sur le tourisme. La création de la Coalition Touristique du Nord d’Haïti par la signature d’un Protocole d’Entente le 29 mai dernier avec « Tourism Care », l’Association Touristique d’Haïti (ATH) et la Fondation Clinton, conforte cette stratégie. Le Ministère du tourisme croit que cette entente « permettra le renforcement d’une coopération commune dans le domaine du tourisme et aidera le Ministère du tourisme à développer des circuits touristiques dans le pays ». Les membres de cette nouvelle coalition s’accordent, entre autres, à œuvrer dans l’amélioration des excursions au Parc National Historique et à s’impliquer dans la formation de guides et d’agents du secteur touristique. L’inauguration, le 6 juin dernier d’une importante structure d’accueil touristique à Milot dans la localité de Choiseuil (Nord d’Haïti) Le Parking de Choiseuil, situé à environ 1.5 km au pied de la Citadelle, a été réaménagé en un important centre d’accueil renfermant un restaurant, une infirmerie et une salle d’interprétation audiovisuelle. Onze kiosques pour vente de produits artisanaux sont également érigés dans l’aire de la structure d’accueil au bénéfice des petits marchands de la zone. Le projet de sauvegarde et développement du Parc national historique «Citadelle, Sans Souci, Ramiers » est en déclinaison avec cette vision. Il répond directement à des besoins identifiés par le décret présidentiel du 21 juillet 2010 et sa mise en œuvre se fera en étroite coopération avec les autorités nationales (ISPAN : Institut de sauvegarde du patrimoine national). Pour l’Envoyée spéciale de l’UNESCO pour Haïti, plusieurs actions concernant la législation, la gestion, la cartographie ainsi que des actions concrètes doivent être entreprises à brève échéance, en vue de l’adapter aux normes du patrimoine mondial et donc de lui permettre de conserver ce statut de site inscrit. « Outre son appui à ces actions, le projet contribuera de façon significative au renforcement de l’activité économique, notamment à travers le développement du tourisme, et fournira davantage d’opportunités aux communautés vivant sur le site ou à proximité. Compte tenu du fait que le soutien communautaire est fondamental pour le succès du projet, les conditions de vie des communautés de Milot et Dondon doivent être améliorées ». Créé, par décret en date du 29 mars 1979, l’Institut de Sauvegarde du Patrimoine National (ISPAN) est, selon les stipulations du décret de 1984 réorganisant le Ministère de l’Information, de la Culture et de la Coordination, un Organisme déconcentré sous tutelle directe du Ministre de la Culture et chargé d’appliquer la politique culturelle de l’État en matière de préservation et de mise en valeur des biens immobiliers à haute valeur culturelle (monuments, sites et ensembles historiques) du Patrimoine National. Source : UNESCO / Envoyée spéciale de l’UNESCO en Haïti / ISPAN HA/Radio Métropole Haïti