
Il y a une dolarisation de fait de l’économie haïtienne, affirme l’économiste M. Joseph Harold Pierre, commentant les mises en garde des autorités monétaires haïtiennes en de qui a trait à la double circulation monétaire. M. Pierre note que deux tiers des dépôts dans le système bancaire sont en dollars américains. Contrairement à des pays, tels Le Salvador et l’Équateur qui ont adopté le dollar comme monnaie officielle, en Haïti le dollar a été adopté de facto par les opérateurs économiques.
Les statistiques font état de 45% des retraits en dollar. C’est plus qu’une double circulation de l’avis du spécialiste qui attire l’attention sur la volonté des acteurs de se prémunir de la faiblesse de la gourde.
L’inflation entraîne une dévaluation de la gourde
En raison de plusieurs facteurs, la valeur réelle de la gourde ne cesse de diminuer. Les opérateurs économiques préfèrent épargner dans une devise forte afin de conserver la valeur réelle de l’argent. L’inflation, qui tourne autour de 30%, pousse irrémédiablement les agents économiques vers le dollar américain, argue M. Pierre.
C’est normal que les agents économiques refusent d’utiliser la gourde, ajoute t-il rappelant qu’en 2022 l’inflation avait atteint 48%. À ses yeux la démarche des autorités gouvernementales doit viser à réduire l’inflation.
D’autres facteurs contribuent à la dépréciation de la gourde. Entre autres le taux de change. L’expert signale que les agents économiques doivent acquérir le dollar afin d’importer des biens et services.
M. Pierre indique qu’il faut considérer les sources de devises pour comprendre la rareté du dollar.
Parmi les principales sources de devises figurent les investissements directs étrangers. La crise sécuritaire a réduit à une peau de chagrin ce facteur. Les investissements directs étrangers sont de l’ordre de 34 millions de dollars en 2024 tandis qu’ils avoisinent les 10 milliards de en République Dominicaine.
Le secteur de l’exportation, également source de devises, est fortement perturbé.
Les exportations haitiennes sont de l’ordre de 875 millions de dollars. En 2016 les exportations étaient supérieures à 3 milliards. En réalité seuls les transferts de fonds de la diaspora demeurent comme source de devise.
Des outils financiers et économiques pour inverser la tendance
L’économiste juge que la politique monétaire de la BRH, consistant en des interventions sur le marché, empêche une forte dévaluation de la gourde.
De plus il soutient que l’arrêt du financement monétaire du déficit budgétaire est une action positive du gouvernement. À son avis d’autres dispositions telles les bons BRH et les bons du Trésor peuvent contribuer à améliorer la situation. Toutefois la relance de l’économie pour combattre l’inflation est la solution la plus viable pour renforcer la monnaie locale.
La BRH est alarmée par la dolarisation de facto
Les autorités monétaires haïtiennes sont alarmées par le phénomène de la double circulation monétaire. La BRH tire la sonnette d’alarme sur les effets néfastes de l’usage abusif d’une monnaie étrangère dans les transactions locales.
Ce phénomène fragilise la politique économique et compromet la stabilité financière. L’usage massif du dollar fragilise fortement l’efficacité de la politique monétaire. Les dispositions pour contrôler la masse monétaire et lutter efficacement contre l’inflation n’obtiennent pas les effets escomptés. Sur le plan macroéconomique la double circulation réduit les revenus de la BRH tirés de la création monétaire et accentue la dépendance du pays vis à vis du dollar américain. Elle favorise également la spéculation, la volatilité des prix et la perte de confiance dans la monnaie locale.
LLM / radio Métropole Haïti

