« Si les dix candidats prêtent serment et deviennent juges à la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif, ils relèvent automatiquement après leur prestation de serment de la Haute Cour de Justice et la Haute Cour de Justice est formée du Sénat de la République qui les avait désignés ». C’est la conclusion à laquelle est parvenue le juriste et chef de parti politique Osner Févry alors qu’il examinait la situation « aussi tendue que conflictuelle » opposant le pouvoir exécutif au pouvoir judiciaire autour de la nomination des dix nouveaux juges de la Cour supérieur des comptes et du contentieux administratif. « C’est malheureux de mettre l’accent uniquement sur la position de l’Exécutif et d’oublier aussi les négligences du Sénat de la République; [..] Pourquoi l’Exécutif a-t-il attendu cinq mois pour soumettre ses griefs ? « »Pourquoi le délai de dix jours n’a pas été respecté pour la présentation des objections, par exemple des objections quant à la validité des diplômes, l’authenticité de tel diplôme par rapport à ce que dit la loi, ce que dit la Constitution », se demande Osner Févry.Invité à l’émission « Le Point » de Radio-Télé Métropole, Me Févry a manifestement cherché à faire la part des choses, tout en reprenant toutefois les objections de l’Exécutif au sujet des dossiers de candidature de Mehu Melius Garçon, Rogavil Boisguene et Madame Marie Neltha Fétière. »Après avoir vu les dossiers que le président de la République et le conseiller du président m’ont donnés à voir, je me suis posé la question : est-ce qu’il n’y avait pas une commission sérieuse de sénateurs pointilleux pouvant analyser les erreurs techniques que contenaient ces dossiers ? Abordant le dossier dans lequel un candidat dit qu’il était avocat à la MINUSTAH et, pendant cette même période, juge à la Croix-des-Bouquets, le juriste commente, péremptoire : « Écoutez, si on est juge, on ne peut être que juge, la Constitution et les lois de la République n’autorisent un juge qui est juge à n’être que juge [..] Il ne peut pas s’impliquer dans des activités autres que dans l’enseignement ».Et voila que Mr. le juge était juge et il est en même temps avocat. Les professions sont incompatibles, s’écrie Me Févry. « Quand on est juge, on ne peut pas exercer la profession d’avocat. Et ce juge travaillait comme avocat à la MINUSTHA. Maintenant il se pose une question d’éthique : si vous êtes juge et en même temps vous travaillez comme avocat à la MINUSTHA et vous allez être juge à la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif, quelle est la position de Me Osner Févry qui va plaider devant ce juge ? » « Selon moi, il y a un problème, non seulement d’éthique qui se pose, un problème de moralité qui se pose, mais aussi un problème de stature professionnelle », constate le vice-président du conseil national des partis politiques, un regroupement de differentes formations de l’opposition.Soulignant les erreurs découvertes dans les dossiers de deux autres candidats, le principal dirigeant du Parti démocrate chrétien haïtien (PDCH) n’y va pas par quatre chemins : « Écoutez, je ne peux pas demander au président de la République ou à n’importe quel fonctionnaire qui se respecte de dire qu’il en présence d’un document authentique ». »Nous n’avons pas prononcé le mot « faux », parce que le faux ne se constate pas, le faux se vérifie et se confirme à partir d’indices, suivis d’investigations, de recherches appropriées devant une juridiction compétente : le juge d’instruction, par exemple ». Mais, ajoute-t-il, il y a des doutes sur la validité, il y a eu des irrégularités, visibles en regardant ces diplômes.Alors là, se demande-t-il, « est-ce que l’Exécutif a eu tort de refuser d’accepter cette candidature, d’autant plus que la Constitution et la loi de 1983 explicitent très clairement les conditions à remplir pour être un juge à la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif ». « Depuis le décret de 1957, de 1959, de 1983 sous la présidence de Jean Claude Duvalier et 2006, croit-il bon de préciser, tous les textes législatifs font obligation à celui qui est candidat juge à la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif d’être licencié en droit, d’être un comptable agréé ou d’être détenteur d’un diplôme en administration publique et d’avoir travaillé pendant cinq ans au moins dans l’administration publique ou privée, d’être de bonne vie et mœurs, d’être haïtien et n’avoir jamais renoncé à sa nationalité, etc ». À la question de savoir si l’Exécutif a transmis officiellement ses objections au Sénat, Me Févry en est convaincu qui se réfère à « ce qui a été dit au cours du dialogue avec le pouvoir législatif, notamment au Sénat et aux propos d’un conseiller du pr(sident martelly, l sénateur Youri Latortue.Le fait par le Senat de confirmer la validité des diplômes des deux candidats contestés par l’Exécutif a jeté de l’huile sur le feu, « de telle sorte que la situation demeure aussi tendue que conflictuelle qu’elle l’était avant ».La situation actuelle, il la résume en peu de mots : « Les dix noms doivent être publiés [selon le Sénat], et l’Exécutif a des objections ». Alors, poursuit-il, « nous faisons tout simplement ces remarques pour dire que la question devient politique, elle cesse d’être uniquement constitutionnelle, légale, elle devient aussi politique ».Et comme on est en négociation, faut-il bien que, comme l’avait proposé le sénateur Stevenson Benoit, « pourquoi ne pas engager le processus par étape : 1.- On publie les noms de ceux sur qui on n’a aucun grief, et 2.- par la suite les noms des trois autres candidats objet de controverse après enquête.Et comme la question est corsée, rappelle-t-il, si on publie les noms avec réserves pour l’Exécutif de mener une investigation autour des trois noms sur lesquels pèsent certains doutes, les 10 candidats vont prêtent serment et deviendront juges à la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif. »A partir de là, ils relèvent automatiquement, après leur prestation de serment, de la Haute Cour de Justice et la Haute Cour de Justice est formée du Sénat de la République qui les avait désignés ». Source : « Le Point » de Radio TV Métropole » HA/radio Métropole Haïti
Cour supérieur des comptes : la situation est corsée car la question devient politique, selon Osner Févry
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