Les hommes de loi peuvent toujours parler d’illégalité, les leaders politiques et les organismes de la société civile peuvent continuer à dénoncer l’inconstitutionnalité du nouveau conseil électoral, mais le pouvoir est en mode « tet dwat, adelante », c’est plus qu’une évidence maintenant que l’exécutif a trouvé la formule pour mettre hors-jeu la cour de cassation. C’est Guichard Doré, l’un des intellectuels du cabinet du président Jovenel Moise qui a porté le coup de grâce : la constitution ne fait aucune obligation aux membres du conseil électoral provisoire de prêter serment, la loi mère parle de conseil permanent affirme le conseiller du chef de l’état à qui veut l’entendre. Donc en donnant investiture au nouveau conseil, la constitution n’a pas été violée martèle Guichard Doré. Les juges de la cour de cassation croulent sous les correspondances les invitant à ne pas recevoir la prestation de serment des nouveaux conseillers ; en reportant la cérémonie mardi, les sages n’ont pris aucune décision arrêtée sur le sort de ce CEP ; a présent que le palais brandit l’article 194-2 de la constitution en vigueur pour contourner la cour, quel peut être légalement la réaction de cette institution ? Entretemps, les nerfs sont à vifs, la pilule est difficile à avaler. Certains vont jusqu’à déplorer que le palais national veuille jouer avec l’intelligence de tous les haïtiens en exploitant cet article de la loi mère. Pourquoi tous les CEP depuis 87 ont prêté serment ? La prestation de serment est-elle juste une formalité ou un acte de légitimation ? Si la constitution est d’application stricte comme veut le défendre le pouvoir en place, pourquoi parler de conseil électoral provisoire en 2020 alors que la constitution de 87 n’en prévoyait qu’un seul ? Ces questions sont agitées et servent d’arguments à ceux qui ne veulent pas accepter le jeu de langage du professeur Doré. Habitué à imposer sa volonté et à passer en force, Jovenel Moise réussira-t-il à aller jusqu’au bout avec ce conseil à deux missions. Si certains mettent en avant le soutien de l’administration Trump au pouvoir en place pour se convaincre que le projet peut passer, force est de souligner que les Etats Unis ne se sont toujours pas prononcés sur le premier mandat du CEP : doter le pays d’une nouvelle constitution. Dans son tweet, l’ambassade américaine a parlé de décret électoral et de calendrier, mais pas d’assemblée constituante ni de commission d’experts ; dans son discours mardi au moment de donner investiture au conseil, le président Moise n’a pas non plus accordé trop de place à ce premier mandat, reste à savoir pourquoi. Le CEP a été investi dans ses fonctions, il sera peut-être installé sous peu ; mais le président peut-il déjà crier victoire considérant que son mentor, Michel Martelly avait dû mettre en place trois conseils avant que l’un ne réussisse à réaliser un tour d’élections sans pouvoir boucler le processus électoral. Luckner GARRAUDJournaliste Radio/Télé Métropole•••________________________________________
En dehors et dans la constitution, le président Moise avance dans ses projets
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