Dans les jours qui ont suivi la catastrophe, de milliers d’Haïtiens ont fui Port-au-Prince et sa région pour rejoindre les zones rurales dans des bateaux affrétés gratuitement par le gouvernement. Au sud-ouest de l’île, le département de la Grande Anse a accueilli en moins de 3 mois plus de 120 000 personnes pour une population initiale d’environ 400 000 habitants. Avec 30% de personnes supplémentaires, c’est le premier département d’accueil de déplacés.En traversant la ville de Jérémie, capitale de la Grande Anse, on ne croise aucun camp d’hébergement, comme on peut en voir à Port-au-Prince. Car les déplacés ont rejoint le département pour trouver refuge dans leur famille. Aujourd’hui, la situation est critique et la pression sur les familles d’accueil est énorme. Chaque famille accueille entre 3 à 10 personnes, dans une situation de précarité renforcée, souligne Thérèse Benoit, coordinatrice du programme de MdM à Grande Anse.Dinia, 34 ans, accueille, depuis deux mois, trois de ses proches qui ont fui Port au Prince : sa belle sœur et les deux enfants de sa sœur ainée. Celle-ci a été amputée suite au tremblement de terre et espère venir à son tour rejoindre sa famille et ses enfants : Avant nous vivions à 7, aujourd’hui nous sommes 10, dans une maison qui ne compte que 3 chambres. Alors nous nous tassons mais c’est difficile et encore plus de trouver de la nourriture pour tout le monde. Nos récoltes ne sont pas suffisantes et les prix ont vraiment augmenté. Avant pour 1 mesure d’huile je devais payer 12 gourdes, aujourd’hui c’est 20 gourdes.«Cette hausse des prix, conjuguée au nombre croissant de personnes à nourrir, nous font craindre une aggravation des poches de malnutrition dans les mois à venir, en particulier chez les enfants », explique Jean Kith Dely, coordinateur médical du programme de MdM. « Dans chaque centre, nous dépistons donc systématiquement tous les enfants de 6 mois à 5 ans […] et nous référerons les cas les plus graves vers les centres pour une prise en charge. «Celle-ci consiste essentiellement par de la pâte Plumpy Nut» expliquent Andrea et Suzy, infirmières chargées de ce volet. «à base d’arachide cette pâte est très riche en protéine et assure des résultats impressionnants. Actuellement nous recevons chaque jour une dizaine d’enfants atteints de malnutrition aigue sévère» soulignent-elles.Le séisme a montré à quel point tout était centralisé à Port-au-Prince. Pour lutter contre cette centralisation extrême, le gouvernement haïtien a donc fait part de sa volonté de stabiliser les déplacés dans les provinces mais «cela nécessite de développer des projets sinon ils repartiront pour trouver du travail à Port-au-Prince. Un phénomène que nous commençons déjà à observer» témoigne Thérèse Benoit.Sous un grand chapeau noir, Délice, 32 ans raconte qu’elle a fui Port-au-Prince 5 jours après le séisme, avec le 1er bateau affrété gratuitement.«Je suis arrivée avec 3 de mes enfants de 2, 3 et 5 ans. Mon mari a été blessé par le tremblement de terre et est aujourd’hui handicapé, il ne peut plus travailler. Il est resté à Port au Prince avec ma première fille de 12 ans qui a, elle aussi été blessée au poignet par la chute d’un gros bloc de béton. Je suis venue rejoindre mes parents ici. Nous vivons à 15 dans une maison de 3 pièces. Je n’ai pas d’argent, je n’ai rien à donner à mes enfants. Ce sont souvent des voisins ou des amis qui nous dépannent ou bien, j’achète à crédit. Je pense revenir bientôt à Port-au-Prince, parce que la situation est vraiment trop difficile ici».N/ Radio Métropole Haïti
Exode: La pression sur les familles d’accueil est énorme
Publicité