Les défis en matière de gouvernance et de réglementation doivent être adressés avant qu’Haïti puisse exploiter ses ressources d’or, d’argent et de cuivre, selon un rapport récent de l’organisation d’aide humanitaire et de développement Oxfam. Suivant ce rapport , les revenus potentiels provenant de l’exploitation minière pourraient être essentiels pour le pays d’Haïti dans sa quête pour résoudre les défis persistants liés au développement du pays –pauvreté généralisée, inégalité extrême, faiblesse des institutions, hauts risques de corruption et vulnérabilité aux désastres- mais à date, il existe très peu de faits pouvant suggérer que les réglementations et capacités haïtiennes actuelles ou proposées en matière de gestion minière et fiscale sont adéquates pour gérer de manière efficace ce secteur. « Le gouvernement haïtien devrait d’abord promouvoir et structurer un système de gestion intelligente des revenus à investir dans des initiatives visant le développement en faveur des plus pauvres, » soutient Damien Berrendorf, Directeur d’Oxfam en Haïti. « L’exploitation minière peut être une bénédiction tout comme une malédiction pour le peuple haïtien, et il faut prendre des mesures claires pour s’assurer que ces revenus seront gérés de manière responsable. Oxfam espère que son nouveau rapport permettra de tenir informé le système de gestion du gouvernement haïtien et assurer que les rentrées minières soient reçues de manière éthique, au bénéfice de toutes les communautés et de manière responsable vis-à-vis d’elles.» Si nous remontons l’histoire, nous verrons que l’industrie minière s’est toujours développée timidement en Haïti. Cette situation est en passe de changer, et aujourd’hui, les investisseurs étrangers ont les yeux rivés sur Haïti en vue d’exploiter et d’exporter ces ressources souterraines d’or, d’argent et de cuivre. Malgré une assistance considérable des bailleurs étrangers depuis 1990, qui a cru suite au tremblement de terre de 2010, le système de gestion des finances publiques haïtiennes reste faible, inefficace, et sujet à la corruption. Il existe peu, pour ne pas dire pas, d’indicateurs prouvant que le système de gestion des finances publiques d’Haïti à la capacité de gérer efficacement les revenus attendus de l’exploitation minière. De plus, l’actuel avant-projet de loi contient de sérieuses lacunes qui pourraient mettre en péril l’environnement d’Haïti et le bien-être des communautés affectées, et pourraient même restreindre la capacité du gouvernement haïtien à réglementer la question minière de manière effective. En particulier, les dispositions prises en matière d’études d’impact environnemental, de transparence financière, de dédommagement pour les terres réquisitionnées, et de cautions financières devraient être renforcées, de même que les dispositions concernant les fermetures et les coûts de nettoyage des mines abandonnées. « Il existe de sérieuses inquiétudes quant à la teneur des projets de loi existants et proposés, de même que sur l’implication du public dans leur processus de rédaction, » déclare Berrendorf. Pour faire face à ces problèmes, nous croyons qu’il est d’une importance capitale que le gouvernement engage la société civile dans les dialogues sur les meilleurs moyens d’opérer en ce qui concerne l’exploitation minière. Si ces problèmes ne sont pas adressés, cet argent pourrait être mal géré ou se perdre en manœuvre de corruption, et non pas dirigé vers des initiatives pour la réduction de la pauvreté et de l’inégalité, et conduire au gaspillage de revenus non renouvelables que les Haïtiens n’auront la chance de développer qu’une seule fois.» Oxfam exprime ces quelques recommandations pour le gouvernement et la société civile: •Le moratoire qui concerne toutes les nouvelles concessions d’exploration et d’exploitation devrait être formalisé à travers une loi. Même si pour le gouvernement, le besoin de nouvelles sources de revenus à investir dans la lutte contre la pauvreté se fait urgemment sentir, cette urgence ne devrait pas détourner l’attention sur la nécessité de mettre à niveau les cadres de travail légal et réglementaire. Ceci inclut des efforts d’évaluation complète des impacts sociaux et environnementaux directs et indirects que l’industrie minière pourrait induire, et de déterminer si l’activité minière est « le meilleur usage » à faire des terres déjà fragiles d’Haïti et de ses ressources de surface, au regard des bénéfices à court terme et des coûts à long-terme. •Le moratoire devrait être maintenu et appliqué jusqu’à ce qu’Haïti soit à même de démontrer des progrès significatifs en ce qui concerne les standards minimum de transparence fiscale. Même si le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale (BM) ont fait état de quelques améliorations mineures dans les capacités de gestion fiscale d’Haïti, leurs propres analystes, ainsi que d’autres analystes externes, ont reconnu qu’il restait encore beaucoup à faire. •Au strict minimum, les standards de transparence fiscale devraient inclure une clause de divulgation obligatoire de tous les paiements effectués par les compagnies minières au gouvernement d’Haïti, de même que des licences d’exploration et d’exploitation minière.Ces publications doivent être disponibles à la fois en français et en créole haïtien, et des mesures doivent être prises afin d’assurer que les communautés locales comprennent exactement le contenu de ces publications. •La société civile haïtienne doit jouer un rôle vital de « chien de garde » en ce qui concerne le suivi des activités minières, si elles doivent avoir lieu, et a besoin de support pour bien jouer ce rôle. La capacité de la société civile haïtienne et des communautés locales à gérer convenablement les problèmes liés à l’activité minière doit être considérablement renforcée.Ce renforcement de capacité doit inclure des formations techniques sur des questions telles la fiscalité et l’analyse de contrat, et le suivi sur la qualité de l’eau. •L’avant-projet de loi minière devrait être remanié afin d’intégrer la contribution des représentants de la société civile et d’experts indépendants. L’avant-projet devrait refléter les plus hauts standards en termes de respect des droits humains, de protection de l’environnement, et de transparence, ceci incluant le respect du principe de consentement libre, préliminaire et informé des communautés qui seront potentiellement affectées par l’activité minière. EJ/Radio Métropole Haïti
Haïti n’est pas prête pour l’exploitation de l’or selon un rapport de l’Oxfam
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