À quelques heures de la tenue du second exercice du dialogue binational à Jimani, des organisations haïtiennes continuent de revendiquer une participation concrète de toutes les parties prenantes de la société civile – et non pas seulement le secteur des affaires – dans l’analyse et la redéfinition des orientations stratégiques des travaux de la Commission Mixte bilatérale.Mais plus que tout, comme l’évoque une responsable du secteur civil haïtien ayant pris part activement à l’Atelier binational entre les sociétés civiles haïtienne et dominicaine les 24 et 25 janvier écoulés à Port-au-Prince sur la migration et la défense des droits des migrants : « Je donnerais tout pour nous éviter l’humiliation d’être le dindon de la farce », confie-t-elle en avouant observer les travaux de la Commission Mixte bilatérale avec beaucoup d’appréhension. « Ce plan de régularisation des étrangers est un produit de l’Arrêt 168-13 que les Dominicains veulent introduire comme un cheval de Troie dans le cadre du dialogue binational », met-elle en garde. Le point focal de ce Plan de régularisation des étrangers est le décret présidentiel 327-13 qui met en place un dispositif spécial de naturalisation. »Et c’est là que les autorités haitiennes risquent de mordre à l’hameçon », s’exclame mon interlocutrice, dépitée. Les autorités haïtiennes devront alors délivrer des documents d’identité personnelle aux candidats à la naturalisation qui devront ensuite se présenter au guichet du Ministère dominicain de l’Intérieur et de la police pour être régulièrement enregistrés. »Et devinez qui sera candidat à ce processus dit de régularisation », me demande-elle, sarcastique : Les 250,000 à 300,000 Dominicains d’origine haïtienne qui, en violation de la propre constitution dominicaine, ont été déchus de leur nationalité par l’Arrêt 168-13 de la Cour constitutionnelle dominicaine.L’ex-ambassadeur Guy Alexandre exprime bien ce refus collectif d’avaler une « aussi grosse couleuvre » : « Nous rejetons le paragraphe final de l’article 8 [du Plan de régularisation] ainsi que les articles 28 et 29 par lesquels s’opère l’inclusion dans ce Plan de Dominicains et Dominicaines nées sur le territoire de parents étrangers en situation migratoire irrégulière ».Et, conclut-il, on ne peut être qu’en « total désaccord avec l’inclusion dans ce plan desdites personnes qui, en aucun cas, ne peuvent être considérées comme étrangères ».Les seules parties « acceptables » de ce Plan, soulignent les organisations de la société civile haïtienne, résident dans la possibilité de régulariser la situation des migrants haïtiens vivant illégalement sur le territoire dominicain. »Le gouvernement haïtien doit continuer à exiger la révocation pure et simple de l’Arrêt 168-13 comme condition sine qua non à la signature de tout accord avec les autorités dominicaines », soutiennent les différentes organisations de la société civile haïtienne impliquées dans ce dossier.Le 28 janvier dernier, l’Agence France Presse (AFP), citant des sources diplomatiques, avait rapporté un « dur échange » sur le sujet entre les dirigeants d’Haïti et de la République dominicaine lors d’une réunion à huis clos du Sommet de la Communauté des pays des Caraïbes et d’Amérique centrale (CELAC).Le désaccord entre les deux pays qui partagent l’île d’Hispaniola avait surtout porté sur la récente résolution de la Cour constitutionnelle dominicaine – l’arrêt 168-13 – définissant la nationalité dominicaine et ordonnant l’enregistrement des étrangers en situation irrégulière.Les observateurs croient que cet incident devrait avoir un impact certain sur le prochain round du dialogue binational qui devrait se tenir à Jimani ce lundi 3 février prochain. »Nous resterons quand même très vigilants ». HA/radio Métropole Haïti
Le Plan de régularisation des étrangers, le cheval de Troie de l’Arrêt 168-13
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