Le secteur privé haïtien se plaint du niveau élevé du loyer de l’argent sur le marché monétaire

Essayant de vendre cette semaine son plan quinquennal (2001-2005) au secteur privé haïtien, le gouvernement Chérestal a rencontré de sérieuses difficultés pour convaincre des responsables d’entreprises évoluant dans un environnement économique extrêmement difficile. Les hommes d’affaires ont profité de l’occasion pour présenter aux responsables du gouvernement un ensemble de contraintes dans la réalisation de leurs activités. L’une des principales revendications du secteur des affaires est le niveau très élevé des taux d’intérêt sur le marché monétaire. En fait, le taux de base bancaire qui représente le taux chargé par les banques commerciales pour les crédits à leurs meilleurs clients est proche de 30% pour les crédits en gourdes et près de 15% pour les crédits en dollars US, soit près de deux fois le taux de base bancaire (prime rate) aux Etats-Unis. L’augmentation considérable des taux d’intérêt dans l’économie haïtienne résultant d’une politique monétaire restrictive de la banque centrale adoptée depuis plus deux ans, a provoqué une hausse continue des charges financières des entreprises dont certaines arrivent difficilement à rembourser leurs prêts. Ceci a forcé les banques commerciales à alimenter beaucoup plus leur compte de provisions pour les créances douteuses. Le volume de crédit octroyé par les banques commerciales au secteur privé a connu une certaine contraction au cours des derniers mois. Le Ministre de la Planification et de la Coopération Externe, M. Marc L. Bazin, qui avait critiqué sévèrement la politique monétaire de la banque centrale, particulièrement l’utilisation des bons BRH, avant son arrivée au gouvernement, a reconnu le manque de rigueur appliqué dans la politique fiscale. En fait, en dépit de l’absence du support budgétaire international, les autorités financières ont maintenu un niveau de dépenses assez élevé, ce qui a causé ainsi un important déficit budgétaire estimé déjà à plus de 2 milliards de gourdes durant l’exercice fiscal en cours. Ce déficit est financé presque exclusivement par la banque centrale créant une augmentation continue de la masse monétaire. En attendant l’adoption d’une politique économique beaucoup plus incitative, la banque centrale continue d’utiliser la « politique du bâton et de la carotte » dans le système bancaire haïtien. En effet, les autorités monétaires ont décidé récemment d’augmenter le taux de réserves obligatoires sur les dépôts en devises qui sont passés de 21% à 31%. A noter que le taux sur les dépôts en gourdes dans les banques commerciales est également fixé à 31%. Une telle mesure de la Banque de la République d’Haïti (BRH) vise à limiter la capacité des institutions financières à créer de la monnaie. La BRH a apporté en outre une importante modification dans sa politique monétaire en exigeant aux banques commerciales évoluant en Haïti de conserver en dollars US les réserves sur les dépôts en devises. Ces banques étaient obligées, auparavant, de conserver en gourdes les réserves sur les dépôts en dollars US. Ceci permettait aux autorités monétaires de contrôler la quantité de gourdes en circulation dans l’économie et d’éviter de trop fortes pressions inflationnistes. Certains analystes s’interrogent déjà sur l’impact de l’augmentation de la quantité de gourdes sur le marché monétaire découlant d’une telle mesure au moment où des pressions inflationnistes commencent à être ressenties dans l’économie haïtienne. Le taux d’inflation, calculé au cours du mois de mai 2001 en rythme annuel, a atteint le niveau de 17%. Pour compenser les coûts subis par les banques avec l’augmentation continue des réserves obligatoires au cours des deux dernières années, les autorités monétaires ont maintenu les taux sur le marché des bons BRH, un marché réservé exclusivement aux banques, à des niveaux records. www.brh.net. Kesner Pharel,Economiste – Radio Métropole kfpharel@hotmail.com

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