Les ex-insurgés haïtiens créent un parti pour conquérir le pouvoir

Les anciens insurgés haïtiens du Front de Résistance nationale, qui avaient joué un rôle déterminant dans le départ de l’ex-président Jean Bertrand Aristide le 29 février, se sont constitués mardi (18 mai)en parti politique dans le but avoué de conquérir le pouvoir par les urnes. Le FRN présentera des candidats à tous les niveaux lors des élections générales. Le triumvirat habituel de l’ancien front, Guy Philippe, 36 ans, Winter Etienne, 40 ans, et Buteur Métayer, 32 ans, ont annoncé que le nouveau parti prendrait le nom de Front de Reconstruction Nationale (FRN), les trois responsables devenant dans l’ordre secrétaire général, coordonnateur général et président du mouvement. L’annonce en a été faite sur la place d’armes des Gonaïves, haut lieu de l’indépendance haïtienne et de la révolte anti-Aristide, devant un millier de personnes, dont beaucoup d’enfants des écoles qui avaient célébré le matin même à la cathédrale la fête du drapeau haïtien, fêté officiellement chaque 18 mai. Une remise d’armes des ex-insurgés à la police nationale d’Haïti (PNH) était prévue à cette occasion mais a été annulée, les responsable du FRN affirmant que toutes les armes détenues par leurs ex-combattants civils avaient déjà été remises en mars lors de la visite du Premier ministre Gérard Latortue (une vingtaine) puis le 1er mai dernier (une trentaine). Les ex-militaires haïtiens qui ont toujours leurs armes « ne relèvent pas de nous et doivent s’entendre à ce propos avec les autorités », ont déclaré à l’AFP les responsables du Front. Le sujet du désarmement reste sensible, et un contrôle assorti d’une fouille de véhicule (celle de Buteur Métayer) à un barrage de militaires français lundi soir dans le cadre d’un appui à la PNH dans sa lutte contre l’insécurité a provoqué la colère de deux des responsables du FRN. Buteur Métayer a estimé publiquement que les véhicules des chefs du Front sont connus et ne doivent pas être l’objet de fouilles des militaires français. « Les blancs français nous humilient, ils fouillent nos maisons et nos voitures », a-t-il déclaré, avant d’ajouter « à bas l’occupation française, à bas la France, que les blancs s’en aillent, à bas les blancs français ». Le slogan « à bas la France » n’a cependant pas été repris par la foule. Une divergence de date est apparue dans le programme du FRN lorsque Guy Philippe a annoncé: « Nous ferons 2006, nous changerons le pays », allusion à l’entrée en fonction prévue le 7 février 2006 du nouveau président élu, alors que Winter Etienne a annoncé que le FRN « bloquerait le pays si les élections n’avaient pas lieu dans six mois ». Il s’est également livré à une vive attaque contre le directeur général de la police, Léon Charles, accusé d’avoir envoyé, en tant que commandant des garde-côtes, des bateaux contre les hommes du front aux Gonaïves sous le régime déchu. « Les chimères (ex-partisans armés d’Aristide) sont toujours dans la police », a-t-il lancé. Des maillots aux couleurs vert et jaune du FRN avec l’emblème du parti, une truelle et un muret de briques, avaient été distribués au cours des dernières 48 heures dans la ville, mais semble-t-il, en nombre restreint. Une délégation d’étudiants proches de l’ancienne opposition (FEU, fédération des étudiants universitaires) a également assisté au lancement du nouveau parti. GONAIVES (Haïti) (AFP), 19 mai 2004.

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