Loi 169-14 : le président haïtien a-t-il vraiment remercié son homologue dominicain ?

Le président Martelly aurait remercié le président Medina pour avoir promulgué la loi 169-14, une déclaration qui, si elle venait à être confirmée serait en porte-à-faux avec le positionnement des organismes haïtiens, dominicains et étrangers de défense des droits humains sur le sujet.Le président Martelly « a remercié le président Medina pour avoir respecté sa promesse [..] et pour la promulgation de la Loi de Régime Special para las Personnes Inscrites Irregulièremente] dans le Registre Civil y de Naturalisation mis en marche dans le cadre du Programme de Régularisation des Étrangers ». C’est du moins ce qu’a annoncé le quotidien dominicain en ligne « acento.com.do » dans son édition du 12 juin 2014. Martelly aurait fait cette déclaration alors qu’il était en visite à Punta Cana, une station balnéaire très prisée située à l’extrémité Est de la République Dominicaine, pour y rencontrer Frank Rainieri, l’un des plus gros investisseurs touristiques de la République dominicaine et président du Groupe Puntacana. “C’est une première étape, nous sommes encore loin de solutionner tous les problèmes, mais nous avons espoir dans le processus en cours », a-t-il déclaré au journaliste de Acento.dom.Le chef de l’État haitien aurait également profité de l’occasion pour envoyer “un salut spécial de solidarité, fraternité y cordialité » à son homologue dominicain. Cette déclaration, si elle venait à être confirmée, mettrait le chef de l’État haïtien dans un positionnement en complète contradiction, non seulement avec des organismes haïtiens, dominicains et étrangers de défense des droits humains, mais aussi avec des personnalités reconnus et appréciés de la société civile dominicaine.L’un d’eux, Juan Bolivar Diaz, avait qualifié « d’impossible victoire » la promulgation de la loi 169-14.La loi Medina, constate Juan Bolivar Diaz, « pénalise extrêmement le groupe le plus pauvre parmi les pauvres et les plus vulnérables qui n’ont jamais été enregistrés et auxquels on avait refusé l’enregistrement, en violation d’un droit humain fondamental ». »Cette catégorie qu’on fait passer pour des étrangers en ordonnant qu’elle soit inscrite comme tels pendant deux ans avec option de naturalisation ordinaire. Ce qui change la jubilation en tristesse. Il y aura ainsi des familles avec des enfants dominicains et étrangers en même temps ».Juan Bolivar Diaz se désole « qu’on n’ait pas obtenu une victoire totale contre la haine et la discrimination initiées en mars 2007 par la Chambre administrative de la Junte Centrale Électorale dominicaine, puis ratifiées par l’Assemblée plénière ».On ne saura jamais avec certitude – rappelle ce journaliste très respecté dans son pays – « le nombre de personnes qui étaient dépouillées, entre autres, parce que, se référant à huit décennies, plusieurs sont déjà morts, d’autres migrent à différents endroits et beaucoup d’autres encore vivent comme des exclus privés de toute documentation. GARR a déjà dénoncé cette loi qui s’apparente à une stratégie de l’État dominicain visant à faire baisser les pressions autour du dossier de dénationalisation des Dominicains d’ascendance haïtienne. « C’est un complot d’État qui doit être dénoncé car les autorités dominicaines se réfugient derrière cette loi pour maintenir purement et simplement l’apatridie ». Le 10 juin dernier, Amnesty International avait publiquement dénoncé le processus en cours et rejetté « la loi 169-14 (qui) « n’offre aucune sortie humanitaire à la crise de Droits humains née en République Dominicaine suite à la publication de l’Arrêt TC 168-13 ».La promulgation récente de la loi 169-14, dite loi Medina, avait été l’occasion pour la Fondation Robert Kennedy, GARR, RECONOCIDO.DO, MUDHA, de dénoncer l’hypocrisie des autorités dominicaines dans ce dossier, certains allant jusqu’à la qualifier de loi d’application de l’Arrêt 168-13.Amnesty International, dans une lettre ouverte adressée au Président dominicain le 3 juin dernier, avait demandé au président dominicain de faire en sorte que les droits fondamentaux des victimes de l’arrêt discriminatoire du Tribunal constitutionnel dominicain soient respectés et protégés. . HA/radio Métropole Haiti Crédit photo : Acento.do

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