Qui protège l’haïtien???

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L’haïtien d’aujourd’hui est-il dans le déni ou c’est sa résilience qui bat des records ? Un psychologue a posé cette question pour tenter de comprendre le calme des citoyens face à ce qui se passe actuellement dans le pays. « Nous avons franchi la ligne rouge » a-t-il avancé pour justifier son questionnement. Quand la seule force de sécurité du pays entre en rébellion, qui va ou qui pourra éviter le chaos se demande ce spécialiste en psychologie, perplexe.

Lorsque fin 2019 et début 2020, les fantômes de la police avaient fait leur première démonstration en incendiant les stands pour empêcher l’organisation du carnaval national, ou encore en vandalisant les ministères de l’économie et de la justice, certains estimaient qu’une ligne avait été franchie. Mais à l’époque, les membres de cette structure ne faisaient que réclamer, voire exiger ; ils étaient seuls, pas nombreux et  parfois faisaient face à une certaine résistance de la part de policiers en service.

Aujourd’hui, Fantômes 509, ce ne sont plus ces policiers encagoulés qui, pour la majorité, sont en contravention avec l’institution ; aujourd’hui les fantômes ne se contentent plus de formuler des revendications.

Depuis l’échec de l’opération de la PNH à Village de Dieu vendredi dernier, cette structure traitée de délinquant par le chef de la police a de nouveaux membres. Les syndicats de la PNH, notamment le SPNH17, ne se cachent plus et s’arrangent du côté des fantômes ; des policiers en formation ou des agents de plusieurs unités spécialisées de l’institution rejoignent les rangs et font passer leurs revendications, leurs colère. Renforcé, fantômes 509 ne demande plus mais il prend. Pas question que l’un des leurs soit gardé à vue ; peu importe les raisons de votre incarcération, dites fantômes et vous êtes libre. Dans la foulée, les rues sont bloquées, les armes chantent, la tension se fait palpable.

Si l’objectif de fantômes 509 est de libérer, ou disons mieux, de faire évader les siens, la foule qui l’accompagne ne poursuit pas forcement ce même but. Les casseurs, les pilleurs, les braqueurs trouvent une opportunité de mettre en œuvre leur talent, et évidement ils sont sécurisés par la police pour le faire.

Aujourd’hui qui peut légalement empêcher des individus de s’attaquer à des entreprises, à une personne au nom de ce mouvement ? Qui peut se mettre face à ceux qui détiennent le pouvoir légal de porter des armes s’ils veulent les utiliser contre tous ceux qu’ils auraient considérés comme opposant à leur démarche ? Qui protège le citoyen qui est obligé de sortir vaquer à ses occupations ? Aujourd’hui, existe-t-il des fantômes au sein de l’institution policière, ou y-a-t-il juste une police « fantomisée » ?

Haïti s’adapte chaque jour un peu plus à ses « nouveaux normal ». Le pays glisse mais l’haïtien encaisse, avance et finit par croire qu’il est dans une situation normale. Demain est incertain, l’horizon s’assombrit et il n’y a pas moyen de changer de direction si l’on ne réalise pas d’abord que le pays a traversé la ligne rouge il y a longtemps.

Luckner GARRAUD

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