Droit bafoué, le respect des haïtiens piétinés par les politiques

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Depuis 35 ans, Haïti fait l’expérience de la démocratie, ce système qui voudrait que le peuple soit souverain, qu’il soit au centre des décisions et que sa voix soit comptée. Si ce peuple est souvent sollicité, c’est surtout pour les élections quand il doit porter des gens au pouvoir, mais le reste ne suit pas toujours. Pour être souverain, le peuple est-il respecté ? La question est légitime eu égard au comportement des acteurs, notamment les politiques.Depuis tantôt trois ans, les haïtiens sont pris en otage entre un pouvoir faible dont les actions prêtent à certaines interprétations et une opposition stérile qui pense que la violence est le seul outil efficace pour parvenir à sa fin. Les citoyens, au milieu, vivent selon les caprices de ces acteurs qui décident de quand fermer le pays, quand incendier des véhicules ou encore des entreprises.

Impossibles de planifier sur l’avenir car il y a toujours une annonce pour créer de l’incertitude.De l’autre côté, Comment le pouvoir peut-il prétendre respecter le peuple quand il fait si peu cas de ce qui se passe au Bel air ou à la Saline, quand le président prend des engagements qu’il ne peut pas tenir et faire comme s’ils n’ont jamais existé, quand le chef de l’état décide de doter le pays d’une nouvelle constitution sans avoir consulté au préalable ceux qui avaient choisi celle en vigueur ? Comment parler de respect quand le président multiplie les dérives, quitte à mettre de l’eau dans le moulin de l’opposition, qui ne se fait pas prier pour les exploiter à travers des mobilisations qui n’en finissent pas ?

Comme si le peuple devrait être toujours disposé à se plier aux quatre volontés des opposants, un leader a exhorté les haïtiens ce mercredi à prendre des dispositions, à faire le plein de nourriture et tout autre produit nécessaire car le pays va être fermé, encore une fois.

Respecte-t-on ces élèves qui ont déjà perdu deux années de classe ? Où est le respect envers ces entrepreneurs qui ont failli faire faillite à cause des différents épisodes de pays lock déjà décrétés par cette même opposition.

Depuis 3 ans, des acteurs politiques qui affirment défendre le peuple face à un pouvoir qui ne donne pas de résultats, ne peuvent présenter aucune alternative, aucun plan convaincant, encore pire, ils n’arrivent même pas à s’entendre afin de trouver la force nécessaire pour aboutir à leur fin ; mais entretemps, les citoyens sont obligés de subir les conséquences de leurs multiples tentatives, échouées.Si lasal pa bay, chanm pa pran, c’est ce qu’on dit.

Alors quand au plus haut niveau, le respect n’est pas exprimé, comment empêcher une présidente de CEP, fervente défenseure de droits humains d’avoir voulu designer son « gason lakou » au conseil électoral plutôt que de ne pas se faire représenter. C’est normal qu’un militant politique déclare au micro de la presse que lorsque Jovenel Moise aura été « dechouke », c’est celui qui sera assis le premier sur son fauteuil qui deviendra président.Le peuple n’est pas respecté et semble ne pas vouloir lutter pour son respect.

C’est la sociologue Michelle Oriol qui le dit ; manifester n’est pas dans la culture des haïtiens, il leur faut toujours des mille gourdes. Pour sa part le sociologue Laenec Hurbon croit qu’il leur faut une cause commune, peut être que le respect n’en est pas une.En tout cas, depuis quelques temps, le quotidien de 11 millions de citoyens dépend de l’humeur ou du bon vouloir d’une cinquantaine de personnes qui demandent tout au peuple mais qui souvent ne lui donne rien. 

Luckner GARRAUD

Journaliste Radio/Télé Métropole

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