La reconstruction toujours en panne en Haïti

Un an après le séisme dévastateur du 12 janvier 2010, Haïti peine toujours à se relever de ses décombres. Moins de 5% des gravats ont été déblayés et environ un million de personnes vivent encore dans les camps de réfugiés. La reconstruction est entravée par la faiblesse de l’Etat haïtien, des aides financières qui tardent à venir et le manque de coordination entre les 10.000 organisations non gouvernementales présentes sur place. L’aide d’urgence avait afflué après le séisme de magnitude 7, qui a dévasté Port-au-Prince et fait plus de 230.000 morts. Mais la communauté internationale « n’a pas fait assez pour soutenir la bonne gouvernance et un pouvoir efficace en Haïti », juge l’ONG Oxfam dans un récent rapport. « Les agences humanitaires continuent à contourner les autorités locales et nationales dans la distribution de l’aide » et « les donateurs ne coordonnent pas leurs actions ou ne consultent pas de manière adéquate les Haïtiens. »Le volume de décombres qui reste à enlever est gigantesque: de quoi remplir une file de camions bennes alignés pare-chocs contre pare-chocs sur une distance équivalente à un demi-tour du monde. On trouve encore des corps dans les gravats.Pour le groupe de réflexion américain Rand, les donateurs et le gouvernement haïtien sont responsables de la lenteur des opérations de déblaiement. Les ouvriers haïtiens sur les chantiers ne reçoivent pas d’équipement et des engins de levage ont été bloqués par la douane à la frontière, selon un rapport du Rand. Et le gouvernement n’a pas désigné suffisamment de lieux où entreposer les gravats. »Si les décombres ne sont pas déblayés rapidement, des centaines de milliers d’Haïtiens seront encore dans les camps de toile lors de la saison des ouragans de 2011 » qui va de juin à novembre, souligne le rapport.Faute de terrains disponibles, la construction de nouveaux logements a à peine démarré. Des inspecteurs financés par l’aide internationale ont certifié les maisons pouvant être à nouveau habitées mais il semble que la plupart de leurs anciens occupants ne soient pas revenus. Ceux qui quittent les camps de réfugiés le font souvent pour installer leur maigre abri plus près de leur ancienne adresse. Autre carence constatée: seulement 15% des abris temporaires nécessaires ont été construits.Les écoles ont rouvert ici et là: 80% des enfants scolarisés avant le séisme sont de retour dans les salles de classe, selon Nathalie-Fiona Hamoudi, du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef). L’Unicef comptait construire 200 structures scolaires semi-permanentes mais n’en avait terminé que 88 fin 2010, le projet ayant été ralenti par l’épidémie de choléra, qui a fait plus de 3.600 morts dans le pays.La reconstruction pâtit également de la lenteur du déblocage des fonds attendus. Plus de 5,3 milliards de dollars (4,1 milliards d’euros) avaient été promis par les donateurs internationaux le 31 mars dernier mais seulement 824 millions (637 millions) ont été versés, selon le bureau de l’envoyé spécial de l’ONU en Haïti, l’ancien président américain Bill Clinton.Les Etats-Unis avaient à l’origine promis 1,15 milliard de dollars (889 millions d’euros) pour 2010 mais ont reporté la quasi-totalité de leur engagement (près de 1 milliard de dollars, 773 millions d’euros) à 2011 en raison de retards au Congrès et dans l’administration Obama.Le Premier ministre haïtien Jean-Max Bellerive, qui copréside la Commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti avec Bill Clinton, regrette que les promesses de dons tardent à se concrétiser. Mais il pense que ces retards sont peut-être dus aux incertitudes liées à la crise politique apparue après le premier tour de l’élection présidentielle. « Peut-être que certains donateurs se disent: ‘attendons de savoir qui' » succédera au président sortant René Préval, explique-t-il.Déjà faible avant la catastrophe, l’Etat haïtien ne s’est pas encore remis du séisme. Les ministères ont été transférés dans de nouveaux bâtiments, mais n’ont pas pu remplacer les nombreux employés morts dans le tremblement de terre ni le matériel détruit. AP

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