Le Bicentenaire de l’Indépendance célébré dans la tourmente. Au moins une dizaine de blessés dont plusieurs par balle …

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Le 200 ème anniversaire de l’Indépendance d’Haïti , ce jeudi 1er janvier 2004, a été commémoré dans une ambiance de chaos à Port-au-Prince et aux Gonaïves.Manifestations anti-Aristide réprimées par la police , tirs d’armes un peu partout dans la capitale et dans la Cité de l’Indépendance, plusieurs blessés par balle , tel est le décor de cette journée historique . Au Palais National, devant plusieurs milliers de sympathisants , le Président Jean Bertrand Aristide, après la montée du drapeau avec sa femme suivie d’une cérémonie culturelle, a renouvelé sa détermination de terminer son mandat de cinq (5) ans qui s’achève le 7 février 2006. M. Aristide qui ne peut plus être président a exprimé le désir de son parti Fanmi Lavalas de rester au Pouvoir jusqu’en 2015. En ce sens , il a fait une déclaration en 21 points représentant un programme qui doit être réalisé à partir des 21 milliards de dollars réclamés à la France en guise de réparation à la dette de l’Indépendance. Au passage, il a invité l’Opposition et la Société Civile à aller aux élections législatives , cette année. Auparavant , le seul Chef d’Etat présent , Thabo Mbeki , de l’Afrique du Sud avait exprimé ses préoccupations par rapport à la crise actuelle et salué la Révolution haïtienne qui a montré au monde noir la voie de la liberté , le 1er janvier 1804. De son côté , le premier ministre des Bahamas , Perry Christie, représentant du Caricom, a exprimé sa fierté d’être en Haïti en dépit de certains problèmes migratoires entre les deux (2) pays. Pour sa part, la députée américaine de Californie , Maxine Waters, représentant du Black Caucus , a rappelé son amitié à Haïti. Pendant que le Chef de l’Etat prenait la parole, des milliers de manifestants de l’Opposition ,fait sans précédent pour un 1er janvier, à l’appel de la Plate-forme démocratique, gagnaient les rues de Port-au-Prince pour réclamer sa démission. Partis de Pétion-Ville , ils ont longé la route de Delmas en réaffirmant leur détermination de combattre le régime Lavalas. A mesure que les manifestants progressaient, la foule grossissait et la police a décidé de passer à l’action. A l’angle de Delmas et de Nazon ( Carrefour de l’aéroport) , des policiers du Palais National ont tiré en direction des manifestants. Quelques instants après, des agents du CIMO sont intervenus pour barrer la route aux opposants. La route de Nazon s’est transformée en un véritable champ de bataille. Pour répondre aux tirs et aux lancées de gaz lacrymogène de la police, les manifestants ont érigé d’imposantes barricades avec des pierres et des pneus emflammés. Cette situation allait se poursuivre à Lalue , à Bois-Verna et à Turgeau. Dans ces quartiers , des partisans armés du Pouvoir tiraient dans toutes les directions et effectuaient une chasse à l’homme. Au moins dix (10) personnes ont été blessées dont trois (3) par balle. C’est dans cette ambiance d’anarchie que le Président Aristide a effectué une visite éclair aux Gonaïves où il a prononcé un bref discours en présence de plus d’un millier de sympathisants venus des régions avoisinnantes. Dans la Cité de l’Indépendance, aucune cérémonie religieuse , patriotique et culturelle n’a été organisée. L’allocution de M. Aristide s’est effectuée sur fond de tirs nourris en présence du premier ministre Yvon Neptune. (ndlr: les journalistes haïtiens et étrangers ont rapporté par erreur la présence du président Mbeki qui a annulé sa visite aux Gonaïves à la dernière minute) Dans la soirée du mercredi 31 décembre 2003,le podium sur lequel M. Aristide devait prendre la parole a été bondé de matières fécales. Les confrères rapportent que le cortège présidentiel a été pris sous les feux des membres du Front Anti-Aristide qui ont fait face à la riposte des policiers haïtiens appuyés par les militaires sud-africains. Finalement , M. Aristide a pu regagner la capitale par hélicoptère. Après son départ, la police a procédé à plusieurs arrestations et a tenté sans succès d’empêcher la tenue d’une manifestation anti-gouvernementale. Dans la journée , plusieurs dizaines de prisonniers se sont évadés du Pénitencier National à Port-au-Prince. A Gros-Morne, dans l’Artibonite , des détenus se sont également échappés suite à une intervention d’un groupe de manifestants anti-gouvernementaux qui ont saccagé le sous-commissariat de police. Une marche appelant au départ de M.Aristide a été également organisée à Jacmel. La Plate-forme démocratique rassemblant les étudiants , les organisations de la société civile et les partis de l’ Opposition annonce la présentation d’une alternative à Lavalas pour ce vendredi 2 janvier , jour des aïeux. Pour France 2 , la fête du Bicentenaire s’est transformée en tragédie. Pour d’autres confrères, c’est le Bicentenaire de la honte. Pour de nombreux observateurs, la situation est critique et les risques d’affrontement armé sont de plus en plus grands.

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