Nette détérioration de la situation économique en Haïti au cours de l’exercice fiscal 2000-01

Sous l’effet de l’interminable crise politique qui s’est aggravée au cours des derniers mois avec la contestation des élections législatives du 21 mai 2000, l’économie haïtienne s’est retrouvée dans le rouge, au cours de l’exercice fiscal 2000-01, avec la chute de 1.2% du Produit Intérieur Brut (PIB). Ceci confirme le ralentissement continu des activités économiques entamé au niveau de l’économie haïtienne depuis l’exercice fiscal 1998-99. En fait, l’incertitude créée par la crise politique, a limité les investissements privés tant sur le plan national qu’au niveau international. En outre, la cessation de l’aide financière internationale résultant de l’incapacité des acteurs à trouver une solution à la crise politique, a grandement contribué à la forte baisse des investissements publics durant le dernier exercice fiscal. En outre, les pressions inflationnistes ont été maintenues durant l’exercice passé avec le taux d’inflation affichant une moyenne de 16.8%. La plus forte contraction a été observée au niveau des branches d’activité Electricité et Eau, soit près de 43.7%, passant de 87 millions à 49 millions de gourdes. Cette contraction fait suite à des baisses respectives de 4.3 et 3.3% au cours des deux derniers exercices précédents. La mauvaise gestion observée au niveau de l’Electricité d’Haïti (EDH), l’entreprise publique qui contrôle la production et la distribution de l’énergie électrique au niveau du territoire national, a donné lieu à une réduction substantielle de l’offre de kilowatts/heure. Ceci a eu un impact négatif sur les autres secteurs de l’économie haïtienne dont les entreprises ont eu à faire face à des coûts de production de plus en plus élevés. La faiblesse de la production de l’énergie électrique a ainsi rendu les entreprises de moins en moins compétitives au cours des années diminuant considérablement la capacité des exportations du pays. Ces exportations ont chuté au cours du dernier exercice fiscal pour atteindre le faible niveau de 300 millions de dollars US. Les services non marchands dominés par le secteur public ont accusé une progression de 3.3% en raison de la décision des principaux bailleurs du pays de lier le décaissement de fonds à la résolution de la crise politique. Quant aux autres services marchands, ils ont chuté de 0.9%. Au niveau du secteur primaire, la branche d’activité, Agriculture, Sylviculture, Elevage et Pêche, a enregistré une légère progression de 0.6%, passant de 3 milliards 424 millions de gourdes au cours de l’exercice fiscal 1999-2000 à 3 milliards 446 millions au cours du dernier exercice. Une telle progression s’est révélée trop faible pour compenser les contractions successives de 2.8 et 3.6% notées au cours des deux précédents exercices. Le manque d’investissement et l’absence d’une bonne organisation dans le secteur agricole représentent de sérieuses contraintes à la production de biens et services agricoles. Pour les industries extractives, une nette stabilité a été observée au cours du dernier exercice fiscal par rapport à l’exercice précédent. Dans le secteur secondaire, les industries manufacturières ont atteint le niveau de 988 millions de gourdes au cours du dernier exercice fiscal contre 986 millions durant l’exercice 1999-2000, soit une hausse de 0.2%. La diminution de la demande pour les biens assemblés en Haïti au niveau des économies des pays industrialisés, particulièrement les Etats-Unis, a affecté la santé de l’industrie de sous-traitance. Le secteur de la Construction considéré comme l’un des plus dynamiques dans l’économie haïtienne au cours des dernières années, a affiché un important ralentissement durant le dernier exercice par rapport aux deux précédents. En effet, la branche Bâtiments et Travaux Publics a progressé de seulement 1.0% pour atteindre le niveau de 948 millions de gourdes durant l’exercice fiscal 2000-01 par rapport à l’exercice antérieur. A noter que des augmentations de 10.4 et 7.9% ont été observées dans ce secteur respectivement durant les exercices fiscaux 1998-99 et 1999-2000. Dans le secteur des services, la branche Commerce, Restaurants et Hôtels qui représente 26.4% du Produit Intérieur Brut, a crû de seulement 0.6% passant de 3 milliards 403 millions de gourdes au cours de l’exercice fiscal 1999-2000 à 3 milliards 424 millions durant l’exercice 2000-01. Comme la plupart des branches d’activité, le secteur commercial a connu un important ralentissement par rapport aux exercices antérieurs quand des croissances de 4 et 4.7% ont été atteintes. La contraction économique enregistrée au niveau de l’économie haïtienne durant le dernier exercice fiscal a influencé négativement les recettes de l’Etat. Les impôts sont ainsi passés en dessous de la barre de 1 milliard de gourdes, soit 920 millions de gourdes. En dépit de la faiblesse des ressources, le gouvernement a maintenu un niveau de dépenses élevé, ce qui a provoqué un important déficit budgétaire. Ce déficit estimé à plus de 2 milliards de gourdes a été financé en grande partie par la banque centrale en raison de la cessation de l’aide financière internationale. Ceci a causé des pressions sur le marché local des changes avec le dollar US s’appréciant de manière continue par rapport à la gourde haïtienne. Le dollar a en fait affiché une moyenne de 23 gourdes durant l’exercice fiscal 2000-01 contre 19.60 gourdes au cours de l’exercice précédent, soit une appréciation de 17.3%. La dépréciation continue de la gourde haïtienne par rapport à la devise américaine a été soutenue par l’important déficit de la balance commerciale enregistrée durant l’exercice écoulé. Ce déficit qui a atteint le niveau de 685.56 millions de dollars US, est le résultat de la baisse de 8% des exportations qui sont passées de 372.12 millions de dollars US au cours de l’exercice fiscal 1999-2000 à 300.65 millions de dollars US durant le dernier exercice. En dépit de la chute de près de 3% observée au niveau des importations, elles sont restées à un niveau assez élevé, soit 986.21 millions de dollars US au cours de l’exercice fiscal 2000-01. Les importants déficits publics – déficits budgétaire et commercial – liés au net ralentissement des activités économiques qui a été enregistré au cours du dernier exercice fiscal, ont donné lieu à une détérioration continue des indicateurs sociaux, ce qui a provoqué un élargissement de la pauvreté au niveau de la population haïtienne. Il est difficile de prévoir une amélioration de la situation au cours du nouvel exercice fiscal en raison de la nette détérioration de la crise politique après le coup d’Etat du 17 décembre 2001 annoncé par la Présidence. Kesner Pharel – Economiste – Radio Métropole /kfpharel@hotmail.com

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