Nos petits boutons non soignés

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Combien de fois a-t-on entendu cette phrase : « Kite moun yo degaje yo, se lavi yap chèche » faisant référence à ceux qui occupent les trottoirs pour écouler un peu de tout. Quand les marchands laissent leurs espaces pour s’installer dans la rue, c’est le même refrain ; les citoyens en profitent, les mairies abandonnent après quelques tentatives, l’état central ferme les yeux. Au final, Port-au-Prince est désormais un grand marché public à ciel ouvert.

Lorsque pour défendre un candidat, des citoyens bloquent les routes et incendient des institutions publiques, il n’y a pas moyen pour le bénéficiaire de s’opposer à cette pratique une fois élu. Une fois, deux fois, trois fois et c’est devenu la norme. Quand les barricades de pneus enflammés ne sont pas efficaces, des camions sont saisis et placés en travers de nos routes nationales notamment. Les pyromanes n’hésitent plus à se faire plaisir et ne font pas de différence entre le public et le privé.

La situation n’est pas différente pour ce qui se passe aujourd’hui avec Fantômes 509. Au départ, c’était une marche de policiers pour exiger de meilleures conditions de travail. Des agents de la police qui organisent des mouvements de protestation, c’était inédit et certains tiraient déjà la sonnette d’alarme avant même que le premier concert de cartouches n’ait eu lieu devant les locaux de la direction générale de l’institution a Pétion-Ville le 27 octobre 2019. Les protestataires étaient clairs, soit leurs revendications sont satisfaites  ou le plan B, voire le C seraient activés.

Quoiqu’interdit par les règlements internes de la police, les agents ont marché une fois, deux fois et trois fois. A cette phase on était déjà en plein débat sur la création d’un syndicat au sein de l’institution. Alors que les intellectuels analysaient l’opportunité d’une telle initiative, les medias se donnaient à cœur joie d’agiter le sujet, les fantômes avaient déjà quitté les cimetières pour contraindre le haut commandement de la PNH à reconnaitre l’existence du syndicat à grand renfort d’actes violents.

Fantome509 dispute son espace, se renforce, impose ses volontés sous les yeux de l’état, impuissant qui ne fait que répondre aux différentes demandent des hommes encagoulés qui incendient des véhicules, vandalisent des  ministères et terrorisent des citoyens. Qui peut oublier la fameuse recommandation du chef du CSPN en direct sur une station de radio pour libérer 5 policiers placés en isolement et pour lesquels les fantômes mettaient la ville à feu et à sang ?

Un pouvoir sans autorité négocie espérant parvenir à bout du problème. Mais c’est sans compter sur l’appétit gourmant des policiers qui, en position de force, exigent toujours plus ; et quand ils ne trouvent pas, ils prennent comme ils l’ont prouvé en libérant les policiers gardés à vue dans certains commissariats de la zone Métropolitaine de Port-au-Prince.

Aujourd’hui, la police est devenue un véritable fantôme, elle ne peut rien pour personne et dans ce grand désordre, les gens de mauvaises intentions en profitent. L’attaque perpétrée sur la délégation du Belize lundi le confirme.

La situation est hors de contrôle, parce que certains dossiers n’ont pas été gérés à temps ; comme si nos autorités n’ont jamais appris que quand les boutons ne sont pas soignés ils deviennent des plaies ; depuis la nuit des temps, ti bouton te toujou chimen maleng…

Luckner GARRAUD

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